Les innovations, allant du lancement de ChatGPT en novembre 2022 aux solutions automatisées mises en œuvre par des entreprises de toute taille, ont modelé un paysage technologique fortement évolutif. 

Dans cet écosystème qui évolue rapidement, les applications de l’IA font l'objet d’une réglementation minimale et les entreprises endossent souvent la responsabilité de définir elles-mêmes leurs protocoles d’utilisation de l’IA. Cette situation a suscité des inquiétudes quant à la manière dont l'utilisation non réglementée des outils d'IA pouvait produire des résultats discriminatoires, compromettant ainsi la précision et l'exactitude. 

Les voix influentes de l’éthique de l’IA 

La docteure Lynne Parker, une spécialiste reconnue des questions relatives à l’IA ayant exercé à l’Office of Science and Technology Policy de la Maison-Blanche de 2018 à 2022, estime que les réflexions sur la confiance et l'éthique dans le développement des technologies de l'IA sont arrivées trop tard dans le processus. Selon elle, il y a cinq ans encore, l’éthique n’était que rarement abordée au sein de la communauté de chercheurs autour de l’IA lors des conférences sur les technologies. 

Geoffrey Hinton, surnommé le « parrain » de l’IA, a également démissionné de son poste chez Google, arguant que les technologies de l’IA pouvaient être utilisées pour nuire à la population et signer la fin de l'humanité. 

Une étude menée par Pega a montré que seuls 12 % des participants pensaient que l’IA savait faire la différence entre le bien et le mal. Plus de la moitié des utilisateurs ne pensaient pas non plus que l’IA pouvait agir moralement (56 %) ou prendre des décisions impartiales (53 %). 

Avec l'importance toujours plus grande accordée à l’éthique et à la réglementation de l’IA, le moment est venu pour les entreprises de commencer à imaginer comment elles utiliseront l’IA de manière responsable. 

Implications de l’éthique de l’IA pour les entreprises 

Au-delà des considérations éthiques et morales, s’assurer de la fiabilité et de l’éthique de l’IA peut affecter les bénéfices d’une entreprise. 

Une enquête menée auprès des leaders de la technologie et publiée par DataRobot en 2022 a montré qu'une entreprise sur trois (36 %) avait été confrontée à des difficultés ou à des répercussions directes sur leur activité en raison de biais de l’IA, notamment des pertes de revenus (62 %), de clients (61 %), d’employés (43 %) et même des frais juridiques liés à des actions en justice (35 %). 

Dans la mesure où les régulateurs du monde entier surveillent de près les évolutions de l’IA, de nouvelles lois devraient être annoncées prochainement. Un certain nombre de gouvernements a déjà établi des lois pour éviter les biais de l’IA et cibler les contrevenants par des amendes. À New York notamment, l'utilisation d'outils automatisés permettant de prendre des décisions de recrutement pour présélectionner des candidats est interdite, sauf si le logiciel a fait l’objet d’un audit de partialité. 

L'impératif de pratiques éthiques de l'IA 

Les entreprises investissent massivement dans la promesse de l’IA. Les dépenses mondiales des entreprises dans ce domaine devraient atteindre 300 milliards de dollars d'ici 2026. 

Grâce à un usage approprié de l’IA, ces systèmes de pointe pourraient non seulement optimiser les opérations et les profits des entreprises, mais également apporter une contribution positive à la société, notamment en réduisant l’impact sur l’environnement ou en améliorant l’accessibilité aux utilisateurs en situation de handicap. 

Cependant, les entreprises ne devraient pas adopter des outils fondés sur l’IA sans en comprendre parfaitement les implications éthiques. 

Prioriser la transparence 

Adhérer à des principes d’équité et de transparence est fondamental lors du déploiement d'outils d’IA. Cela devrait inclure une communication claire avec les utilisateurs concernant l'usage qui est fait de leurs données, et même une volonté de transparence concernant l'influence de l’IA sur certaines décisions des entreprises. Les modèles d'IA open-source contribuent à améliorer la transparence, car ils permettent la réalisation d’audits par des tiers et une plus grande responsabilisation. 

Garantir la surveillance humaine et l’équité 

Mettre en œuvre une surveillance humaine des décisions prises par l’IA permet d’atténuer les résultats problématiques. Les entreprises peuvent envisager d’établir des comités interservices pour permettre aux équipes d’exprimer leurs inquiétudes. À cet effet, il peut être nécessaire pour les entreprises de dispenser des formations sur l’IA. 

L’équité devrait également être un principe clé pour l'utilisation éthique de l’IA par les entreprises. Cela comprend l’évaluation et la mise à jour d’algorithmes qui pourraient s’avérer discriminatoires à l’égard de certains groupes d’utilisateurs. Des audits externes peuvent également être organisés pour garantir l’impartialité et la rigueur de ces évaluations d’équité. 

Des mesures de protection exhaustives doivent être établies afin de détecter et de rectifier tout biais ou toute pratique contraire à l’éthique de l’IA. Ceci peut être réalisé en définissant des lignes directrices éthiques et des systèmes de responsabilisation, en utilisant des outils de détection des biais et en garantissant que les données utilisées pour entraîner les systèmes d’IA sont variées et représentatives du plus grand nombre de profils et d’expériences possible. 

Préserver la confidentialité des données 

La confidentialité des données est une question fondamentale à l’ère de l’IA et des technologies numériques. Les entreprises doivent s’assurer que de solides mesures de protection des données sont mises en place et qu’elles respectent les lois et les réglementations relatives à la confidentialité. 

Si ces données ne sont pas traitées avec précaution, des parties non autorisées pourraient y avoir accès et en faire une mauvaise utilisation, ce qui mènerait à des violations de la confidentialité et entacherait la réputation de l’entreprise. Apple et Samsung ont déjà pris des mesures pour interdire des applications comme ChatGPT en raison de fuites de données et de préoccupations en matière de confidentialité. 

Ces préoccupations peuvent également influencer l’adoption et l’efficacité des applications de l’IA. Si les clients n'ont pas la certitude que leurs données resteront privées et sécurisées, ils seront moins susceptibles d’utiliser des services basés sur l’IA, ce qui pourra limiter le succès et l'évolutivité de ces applications. 

Les entreprises devraient chercher à améliorer la confidentialité de leurs données en anonymisant celles qui sont saisies dans les systèmes d’IA, en minimisant la quantité de données retenues dans ces systèmes et en garantissant, si possible, des principes de nettoyage des données. 

À l’heure où le monde se tourne de plus en plus vers l’IA, les entreprises doivent prioriser l'utilisation éthique de cette puissante technologie. Avec une planification minutieuse et des mesures de protection rigoureuses, l’IA peut être un outil aussi éthique que révolutionnaire.